Les bijoux berbères remontent dans les temps les plus reculés aux manifestations de l’art nord-africain. Comme la femme égyptienne, la femme carthaginoise, la femme berbère éprouva tout d’abord le besoin de fixer solidement sa coiffure sur la tète, son vêtement sur l’épaule et son haik volant sur le corps.
Cela amena chez elle l’utilisation des aiguilles de métal et l’on peut dire que l’aiguille fut le premier bijou de la femme berbère.
A ce besoin pratique est venu de bonne heure s’allier le sentiment de la parure qui donna naissance à l’art des bijoux. Les aiguilles se transformèrent en jolies agrafes et broches de différentes formes, les ceintures eurent des boucles brillantes , les oreilles connurent les pendentifs, le front se recouvrir d’un diadème pendant que les bras et les jambes s’ornaient d’anneaux et de bracelets variés.
Ce qui frappe tout d’abord quand on voit une femme de la compagne marocaine, c’est la simplicité, la pauvreté du vêtement comparée à la richesse des bijoux : sur la poitrine deux belles agrafes triangulaires de l’argent d’une main reliées par une fortes chaine, ce sont les khelalt ; au cou plusieurs colliers multicolores ou l’argent, le corail, l’ambre s’harmonisent dans des tonalités d’émail bleu, jaune ou vert (elgouladat) ; deux grosses boucles d’oreilles pendant sur les épaules soutenues par un fils dissimulé sous la coiffure (elkhoras) ; des broches rondes sur le front à la naissance des cheveux (tabaa) et quand la fortune de la famille le permet un diadème (el mechbouh en berbère-tadj en arabe). – brillant vient comme une couronne ceindre la tête de ces femmes hiératiques belles et nobles comme des reines. L es vêtements de la femme berbère n’ont pas de manches. Ses bras seraient bien nus si de gros bracelets ne venaient accrocher les lumières. Les doigts ont leurs bagues, les chevilles ont leurs anneaux qui donnent à la démarche une certaine régularité dans le mouvement.
Rien n’est aussi impressionnant qu’une belle fête berbère quand une centaine de femmes s’apprêtent dans leurs plus beaux atours à aller chercher la mariée. Les bijoux de famille sortent de leurs coffres, les voisines prêtent les leurs, ceux que l’on avait commandés ou bijoutier de la ville arrivent au dernier moment. Les femmes sont bien affairées, elles s’aident mutuellement à agrafer des habits neufs, à passer les colliers que l’on avait révisés la veille – on essaie des bracelets, on accroche des pendentifs ; les mères arrangent leurs filles et sont heureuses de les voir belle : compliments petite cris de joie échange d’impression avec cette naïveté et cette simplicité que l’or trouve plus que dons les campagnes. Nul sentiment égoïste, ni fierté déplacée dans ces fêtes qui appartiennent à tous et ou les bijoux et les vêtements semblent une communauté.
Dans le chatoiement des tissu de couleurs, larges plaques d’argent, colliers barbares et pendentifs démesurés, bracelets massifs s’entrechoquent en reflétant mille soleils. Le cortège est en marche, chaque mouvement de terrain produit des miroitements nouveaux ; taches blanches et taches colorées se mêlent avec harmonie une suite de tableaux impressionnants les mouvements sont rythmés.
Les corps se tiennent avec noblesse, parfois il faut s’arrêter, l’étape est longue et les anneaux de pied sont incommodes ; une courbe gracieuse et la cheville se libère. On les remettra plus tard quand on sera arrivé dons la maison de la mariée.
Car alors nulle n’excuse si la toilette n’est pas complète. La toilette de femme berbère, c’est beaucoup moins son costume que l’ensemble de ses bijoux ; ils sont l’objet de toute son attention de tous ses soins. Dans le souk, ces bijoux paraissent bien incommodes à la femme européenne qui s’extasie devant le poids et les dimensions de ces pièces archaïques. Est-il possible de les porter ? Mes bras, mes oreilles, mon cou seraient meurtris ajoute-t-elle. Cependant ils sont bien beaux. Elle passe à son bras, éclate de rire, essaye un gros collier, le remet au marchand et se décide à acheter une broche qu’elle adaptera sur sa robe : outres tems autres murs.
Elle est plutôt attirée par toutes ces imitations de bazar que le mauvais gout a lancées en si grand nombre sous le nom d’articles indigènes. Dans ce domaine rien n’a été néglige pour attirer le client : légèreté des matières premières, variétés des formes, reproduction des éléments décoratifs classiques, émaux, coraux, pierres choisies, chainettes moins lourdes, imitation par oxydation appropriée. Ajoutez à cela un bon marché engeant et voila quantités de bijoux étrangers lancés en séries dans le souk sous le nom de bijoux marocains seuls quelques clients avertis retrouvent encore dans leurs promenades travers la médina le bracelet ou la broche de caractère exécutés dans le sous ou à Mogador.